- 14 Décembre 2016
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- Localité
- Paris
- Véhicule
- Toyota Prius 4
Du « piratage » à la légitimité : comment des entreprises comme la plateforme française de VTC Heetch peuvent s'imposer
Que sont les organisations pirates ?
Les organisations pirates se définissent par trois caractéristiques clés.
Heetch est une start-up française de transport urbain née en 2013 du constat que « les jeunes de Paris et de sa banlieue peinent à se déplacer la nuit, faute d'options adaptées ». Ils ont décidé de créer une plateforme de VTC mettant en relation chauffeurs privés et passagers.
Ce modèle économique, fondé sur les principes de l' « économie collaborative », a empiété sur le monopole des taxis et sur le secteur réglementé des VTC. Malgré les difficultés, Heetch a progressivement construit sa légitimité en trois phases distinctes, répondant aux pressions de différentes manières.
Étape 1 : « pragmatisme clandestin » (2013-2015)
Lors du lancement de Heetch en 2013, un conflit couvait dans le secteur des transports urbains. D'un côté, de nouvelles applications pour les services de VTC (comme Uber) et les plateformes de VTC (comme UberPoP et Heetch) ; de l'autre, les taxis traditionnels et leurs centrales de réservation (comme G7). Ces dernières, ainsi que les autorités gouvernementales, ont commencé à faire pression pour fermer les applications, Uber attirant l'attention des médias.
Durant cette phase, Heetch a adopté une stratégie de « pragmatisme clandestin ». La start-up a évité les confrontations directes et est restée « discrète » auprès des médias. Cette approche s'apparente au « bootlegging » : dissimuler une activité innovante à ses débuts. Heetch a construit une légitimité pragmatique auprès de son public immédiat grâce à des techniques informelles comme le bouche-à-oreille. Cependant, sa légitimité est restée limitée, car elle opérait hors de tout contrôle médiatique et sans l'approbation de l'État.
Étape 2 : « activisme subversif » (2015-2017)
En juin 2015, les chauffeurs de taxi ont organisé des manifestations massives contre la « concurrence déloyale » des nouvelles applications de VTC. La police parisienne a interdit les applications de type UberPoP , dont Heetch . celle de
Tandis qu'Uber fermait UberPoP, Heetch exploitait une faille juridique – son nom n'était pas explicitement mentionné dans l'interdiction – et poursuivait ses activités. En réaction, l'État a pris des mesures sévères contre Heetch : une centaine de chauffeurs ont été placés en garde à vue et leurs fondateurs ont été convoqués devant la justice, accusés de « facilitation illégale de contacts » avec des chauffeurs, de « complicité d'exploitation illégale de taxis » et de « pratiques commerciales trompeuses ».
Heetch a réagi en se lançant dans un « activisme subversif ». Ses fondateurs ont défendu leur service dans les médias, soulignant son utilité publique, notamment pour les jeunes banlieusards en déplacement nocturne . La start-up a créé le buzz en publiant une vidéo satirique présentant des images retouchées de personnalités politiques dans leur jeunesse. Heetch a mis à profit sa légitimité pragmatique, déjà établie au sein de sa communauté, pour gagner en crédibilité auprès d'un public plus large, notamment auprès des journalistes et des décideurs politiques. L'organisation a acquis une reconnaissance publique, mais a également dû faire face à des batailles juridiques de plus en plus nombreuses.
Étape 3 : « radicalisme tempéré » (2017-présent)
En mars 2017, un tribunal a statué contre Heetch, jugeant ses activités illégales . Heetch a temporairement suspendu son service, mais l'a relancé deux semaines plus tard avec un nouveau modèle économique employant des chauffeurs professionnels. Deux mois plus tard, Heetch a tenté de réintroduire les chauffeurs privés, mais, après avoir fait face à de nouvelles poursuites judiciaires, elle a abandonné cette approche au bout de six mois pour se concentrer exclusivement sur les services de transport légaux.
Durant cette phase, Heetch a pratiqué un « radicalisme modéré ». L'entreprise s'est intégrée au système tout en poursuivant son « combat » de manière plus modérée, évitant toute confrontation directe avec l'État et les acteurs de l'industrie. Elle a adopté trois stratégies clés :
Le « piratage » est-il un accélérateur de croissance ?
En définitive, notre étude souligne l'intérêt du piratage comme stratégie pour dynamiser la croissance d'une organisation au service d'une cause publique. En adoptant cette approche, une organisation pirate peut impulser un changement systémique pour répondre à des défis sociaux ou environnementaux.
Cela dit, le piratage comporte un risque inhérent : à un moment donné, il sera probablement confronté à une crise de légitimité déclenchée par la résistance des monopoles ou des pouvoirs publics. Les récents combats de Paul Watson en témoignent. Comme il le dit si bien : « On ne peut pas changer le monde sans faire de vagues. »
theconversation.com
Que sont les organisations pirates ?
Les organisations pirates se définissent par trois caractéristiques clés.
- Ils développent des activités innovantes en exploitant des vides juridiques ;
- ils défendent une « cause publique » pour soutenir les communautés négligées, qui à leur tour les soutiennent ;
- en introduisant des innovations qui répondent à des besoins sociaux spécifiques, ils perturbent les monopoles et contribuent à transformer les systèmes économiques et sociaux.
Heetch est une start-up française de transport urbain née en 2013 du constat que « les jeunes de Paris et de sa banlieue peinent à se déplacer la nuit, faute d'options adaptées ». Ils ont décidé de créer une plateforme de VTC mettant en relation chauffeurs privés et passagers.
Ce modèle économique, fondé sur les principes de l' « économie collaborative », a empiété sur le monopole des taxis et sur le secteur réglementé des VTC. Malgré les difficultés, Heetch a progressivement construit sa légitimité en trois phases distinctes, répondant aux pressions de différentes manières.
Étape 1 : « pragmatisme clandestin » (2013-2015)
Lors du lancement de Heetch en 2013, un conflit couvait dans le secteur des transports urbains. D'un côté, de nouvelles applications pour les services de VTC (comme Uber) et les plateformes de VTC (comme UberPoP et Heetch) ; de l'autre, les taxis traditionnels et leurs centrales de réservation (comme G7). Ces dernières, ainsi que les autorités gouvernementales, ont commencé à faire pression pour fermer les applications, Uber attirant l'attention des médias.
Durant cette phase, Heetch a adopté une stratégie de « pragmatisme clandestin ». La start-up a évité les confrontations directes et est restée « discrète » auprès des médias. Cette approche s'apparente au « bootlegging » : dissimuler une activité innovante à ses débuts. Heetch a construit une légitimité pragmatique auprès de son public immédiat grâce à des techniques informelles comme le bouche-à-oreille. Cependant, sa légitimité est restée limitée, car elle opérait hors de tout contrôle médiatique et sans l'approbation de l'État.
Étape 2 : « activisme subversif » (2015-2017)
En juin 2015, les chauffeurs de taxi ont organisé des manifestations massives contre la « concurrence déloyale » des nouvelles applications de VTC. La police parisienne a interdit les applications de type UberPoP , dont Heetch . celle de
Tandis qu'Uber fermait UberPoP, Heetch exploitait une faille juridique – son nom n'était pas explicitement mentionné dans l'interdiction – et poursuivait ses activités. En réaction, l'État a pris des mesures sévères contre Heetch : une centaine de chauffeurs ont été placés en garde à vue et leurs fondateurs ont été convoqués devant la justice, accusés de « facilitation illégale de contacts » avec des chauffeurs, de « complicité d'exploitation illégale de taxis » et de « pratiques commerciales trompeuses ».
Heetch a réagi en se lançant dans un « activisme subversif ». Ses fondateurs ont défendu leur service dans les médias, soulignant son utilité publique, notamment pour les jeunes banlieusards en déplacement nocturne . La start-up a créé le buzz en publiant une vidéo satirique présentant des images retouchées de personnalités politiques dans leur jeunesse. Heetch a mis à profit sa légitimité pragmatique, déjà établie au sein de sa communauté, pour gagner en crédibilité auprès d'un public plus large, notamment auprès des journalistes et des décideurs politiques. L'organisation a acquis une reconnaissance publique, mais a également dû faire face à des batailles juridiques de plus en plus nombreuses.
Étape 3 : « radicalisme tempéré » (2017-présent)
En mars 2017, un tribunal a statué contre Heetch, jugeant ses activités illégales . Heetch a temporairement suspendu son service, mais l'a relancé deux semaines plus tard avec un nouveau modèle économique employant des chauffeurs professionnels. Deux mois plus tard, Heetch a tenté de réintroduire les chauffeurs privés, mais, après avoir fait face à de nouvelles poursuites judiciaires, elle a abandonné cette approche au bout de six mois pour se concentrer exclusivement sur les services de transport légaux.
Durant cette phase, Heetch a pratiqué un « radicalisme modéré ». L'entreprise s'est intégrée au système tout en poursuivant son « combat » de manière plus modérée, évitant toute confrontation directe avec l'État et les acteurs de l'industrie. Elle a adopté trois stratégies clés :
- conformité – respecter la loi ;
- compromis – équilibrer son service de transport avec sa mission publique ;
- manipulation – lobbying pour influencer la réglementation.
Le « piratage » est-il un accélérateur de croissance ?
En définitive, notre étude souligne l'intérêt du piratage comme stratégie pour dynamiser la croissance d'une organisation au service d'une cause publique. En adoptant cette approche, une organisation pirate peut impulser un changement systémique pour répondre à des défis sociaux ou environnementaux.
Cela dit, le piratage comporte un risque inhérent : à un moment donné, il sera probablement confronté à une crise de légitimité déclenchée par la résistance des monopoles ou des pouvoirs publics. Les récents combats de Paul Watson en témoignent. Comme il le dit si bien : « On ne peut pas changer le monde sans faire de vagues. »

‘Piracy’ to legitimacy: how companies like French ride-hailing platform Heetch can make their mark
The case of the start-up can be seen as an example of how a ‘pirate organization’ operating in legal limbo transitions to a more established company.
